En janvier 2023, Donna Gottschalk croise pour la première fois le chemin d’Hélène Giannecchini. Malgré les quarante années qui les séparent, un lien immédiat se tisse – une rencontre de regards, d’expériences et de sensibilités. Hélène, alors en quête d’images pour un livre sur l’amitié, plonge dans les archives de Donna, écoute ses souvenirs, ses silences, ses colères et ses élans. Ce qu’elle y découvre ne la laisse pas intacte : la vie de Donna, ses combats et la tendresse qui habite ses photographies la touchent profondément. De cette rencontre naît un désir : faire résonner cette voix, faire vivre ces images autrement que dans des boîtes d’archives.

Les photographies de Donna Gottschalk ne sont pas seulement des documents ; elles sont les fragments d’une vie vécue avec intensité. Militante lesbienne dès la fin des années 1960, Donna photographie celles et ceux avec qui elle partage son quotidien, ses luttes et ses amours. Ses images sont un geste d’affirmation : montrer l’existence de ces vies que l’Amérique de l’époque refuse souvent de voir. Elle installe ses modèles – amies, amantes, camarades – dans l’espace intime de son appartement, les laissant se présenter à elle dans leur vérité la plus désarmée. Ses portraits, sans fard, sont autant d’actes de tendresse et de résistance.

Pour Hélène, écrire ce livre n’est pas seulement un travail de recherche, c’est un dialogue intime avec une femme qui a su transformer sa vulnérabilité en force visuelle. Ses textes ne se contentent pas d’accompagner les images : ils les font vibrer, les prolongent, les rendent à nouveau vivantes. Ils invitent le lecteur à entrer dans l’univers de Donna, à ressentir ce qu’elle a vu, ce qu’elle a aimé et ce qu’elle a perdu.
Ce projet à plusieurs voix s’enrichit d’un essai de Julie Héraut, « Archive contre l’oubli », qui revient sur le parcours des deux femmes et la genèse de cette collaboration. Enfin, la photographe et historienne de l’art afro-américaine Carla Williams offre une réflexion sur ce que signifie « être vue », rapprochant sa propre pratique de celle de Donna. Ensemble, textes, images et archives tissent un récit profondément personnel : celui d’une femme qui a trouvé, dans la photographie, une manière de se voir elle-même et d’offrir aux autres la possibilité d’exister pleinement.